La divine bibliothèque

La divine bibliothèque 22 convertis ou, dans le meilleur des cas, des thèses proches de la pensée d’Érasme. Cela compléterait le tableau d’un Cervantès imaginaire, détracteur du catholicisme, contre-réformiste déguisé et même secrètement judaïsant. Avec la commémoration du quatrième centenaire de la publi- cation de la deuxième partie de Don Quichotte et de la mort de son auteur, ces délires et propos infondés se sont répandus davantage, dans le feu de la stupidité et de la vacuité contem- poraines. Certains érudits sont allés jusqu’à affirmer que Don Quichotte n’était pas une œuvre catholique, puisque le pro- tagoniste « n’allait jamais à la messe » [ sic ]. Il a également été écrit que Cervantès était un « anticlérical furieux », pour avoir dénoncé les maux de certains ecclésiastiques de son temps. Et, enfin, certains ont voulu voir en lui un détracteur très sévère du concile de Trente. Il est en effet hilarant de constater que les preuves apportées par certains érudits, tentant de démon- trer que Cervantès était un hétérodoxe ou proche d’Érasme, prouvent en définitive qu’il était tout à fait favorable à la réforme tridentine. C’est le cas, par exemple, de Marcel Bataillon lors- qu’il présente la façon de vivre du chevalier du Vert-Gaban (II, 16) comme un recueil de pratiques pieuses érasmistes : « J’entends la messe chaque jour », nous dit le personnage de Cervantès ; « je donne aux pauvres une partie de mon bien, sans faire parade des bonnes œuvres, pour ne pas ouvrir accès dans mon âme à l’hypocrisie et à la vanité, ennemis qui s’emparent tout doucement du cœur le plus modeste et le plus circonspect. J’essaye de réconcilier ceux qui sont en brouille, je suis dévot à Notre-Dame, et j’ai toujours pleine confiance en la miséricorde infinie de Dieu Notre-Seigneur. » Si ce n’est pas du catholicisme traditionnel, je dois être une svelte sylphide blonde !

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