La divine bibliothèque
La divine bibliothèque 24 une cinquième, qu’on pourrait placer en second, ce serait la défense de leur patrie » (II, 27). Lorsque Cervantès définit la mission des chevaliers, il ne peut le faire avec des mots plus irréprochablement catholiques : « Ainsi, nous sommes les ministres de Dieu sur la terre, et les bras par lesquels s’exerce sa justice » (I, 13). Et plus loin, se réfé- rant à la gloire, il soutiendra : « Cependant, nous autres chré- tiens catholiques et chevaliers errants devons plutôt prétendre à la gloire des siècles futurs, qui est éternelle dans les régions éthérées des cieux, qu’à la vanité de la renommée qui s’obtient dans ce siècle présent et périssable » (II, 8). Notre bon hidalgo ne perd jamais le sens de la hiérarchie entre les questions saintes et profanes : ainsi, dans son célèbre discours sur les armes et les lettres , il déclare qu’il ne cherche pas la comparaison avec les lettres divines, « dont la mission est de conduire et d’acheminer les âmes au ciel » (I, 37). Et lorsqu’il ressent les angoisses de la mort, après avoir remercié Dieu de lui avoir rendu la rai- son, Alonso Quijano demande immédiatement un confesseur, car « ce n’est pas dans une telle extrémité comme celle-ci que l’homme doit se jouer avec son âme » (II, 74), laissant tout le monde très édifié par sa rectitude. Les citations des Saintes Écritures dans Don Quichotte sont innombrables. Certaines d’entre elles sont très révélatrices d’une sensibilité catholique et non d’une contamination luthérienne : « La reconnaissance qui ne consiste que dans le désir est chose morte, comme la foi sans les œuvres » (I, 50) ; « Garde la crainte de Dieu, car dans cette crainte est la sagesse » (II, 20) ; « Deux êtres que Dieu réunit, l’homme ne peut les séparer » (II, 21), etc. Et ce n’est pas en vain que Don Quichotte inclut la théolo- gie parmi les disciplines que tout chevalier errant doit maîtriser,
Made with FlippingBook
RkJQdWJsaXNoZXIy NzMzNzY=