La divine bibliothèque

13 Prologue à ces préoccupations. En somme, ils veulent que notre vision particulière du monde occupe une tribune d’où l’on peut s’ex- pliquer librement. Rapidement, ces promesses se sont révélées fausses, à des degrés divers. Certes, il nous a été parfois autorisé de présenter notre vision du monde (forcément à contrecœur et dans un contexte constamment hostile), mais au prix de renoncements successifs à nos recherches intellectuelles et à nos préoccupations littéraires. À d’autres moments, nous nous sommes obstiné, ignorant les avertissements, chaque fois plus cinglants, de ceux qui auparavant nous avaient flatté pour col- laborer, toujours à condition d’être progressivement acculé ou réduit à l’insignifiance. Nous nous sommes retrouvé tout sim- plement dans des tribunes où tout ce que nous sommes, nos préoccupations littéraires, nos recherches intellectuelles, notre vision particulière du monde (raisons pour lesquelles on préten- dait nous offrir de telles tribunes), étaient durement méprisées, ignorées, voire rejetées ouvertement. Des tribunes où il était immédiatement démontré que nos recherches intellectuelles n’avaient tout simplement pas leur place. Des tribunes où nos préoccupations littéraires étaient systématiquement bafouées. Et où, finalement, nous avons dû nous compromettre avec les laquais de tel ou tel débat politique, dans des discussions sur des sujets qui ne nous intéressaient pas. Des querelles de chapelle illustrant ce que Leonardo Castellani avait à raison qualifié, à propos de la liberté d’opinion, de « brevet du sophiste » et de « cri des imbéciles pour faire taire les sages » (même si, au milieu de ce pandémonium, il n’y a jamais de sage). Malheureusement, les médias s’adressent à des audiences – qu’eux-mêmes ont façonnées – toujours plus fanatiques et pavloviennes qui ne souhaitent ni lire ni écouter les mots qui interpellent, mais

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