Guide spirituel des pèlerins

L e d é s e r t C’est le désert du « Croissant fertile », traversé par Abraham et les patriarches, le désert du Sinaï, où Moïse et Élie firent l’expérience unique du Tout-Autre, le djebel Qarantal, « mont de la quarantaine », où Jésus connut la tentation, désert ponctué par les laures des moines d’Égypte et du Proche-Orient. Inchangé depuis des millénaires, toujours aussi dépouillé, aussi aride, le désert nous donne à contempler deux étonnants paysages : le reg, avec ses étendues muettes de cailloux, ses hauts plateaux désolés, ses failles abruptes qui s’ouvrent soudain devant nous ; l’erg, dans la péninsule du Sinaï, qui déroule ses dunes de sable blond. Le reg et l’erg, aux noms composés des mêmes lettres, se présentent comme les deux faces de la réalité, comme les deux faces de notre être, capables de nous rendre, tour à tour, doux comme le sable et blessants comme la pierre. En ces lieux, les textes bibliques acquièrent un relief extraordinaire. Il faut avoir senti la soif se creuser au fond de soi quand, dans l’insoutenable chaleur du plein midi, l’ombre a partout disparu. Rien n’a changé depuis l’époque des patriarches, depuis l’époque du Christ. Il semble que Jésus pourrait être là, dans le creux d’un rocher du désert de Juda. Tout est « révélé » de sa soif, de sa faim, de son affrontement avec les forces du mal. Comme lui, le désert nous met à nu. Seuls face à nous-mêmes, nous n’avons guère de choix, sinon entre la tentation et l’adoration. En projetant en nous un peu plus de lumière, le désert nous aide à entrevoir quelque chose de la vérité de notre être. Passage aux limites, le désert est fait pour être traversé. 36

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