10 La Création du monde Vincent Raymond de Lodève (v. 1500-1557), 1542, enluminure sur parchemin, 37 x 25 cm, Bibliothèque nationale de France, Paris Deux luminaires placés au firmament pour que la terre, ses herbes, ses arbres et ses rivières soient éclairés le jour comme la nuit. Les trois premiers jours, Dieu a créé la lumière, le ciel, les eaux, la terre, et la végétation. Le quatrième jour, bien que les soirs et les matins existent déjà dans le récit, c’est le temps qui prend forme quand Dieu dit : Qu’il y ait des luminaires au firmament du ciel, pour séparer le jour de la nuit ; qu’ils servent de signes pour marquer les fêtes, les jours et les années (Gn 1, 14). Le cinquième jour verra se lever « le premier soleil sur le premier matin » (Charles Péguy). Comme elle est paisible, cette terre brune, verte et bleutée qui attend les jours et les nuits ! L’enlumineur a estompé les collines lointaines dans une aube, ou un crépuscule, encore indistincts. Il a placé au premier plan une eau pure qui semble prête à déborder de la page, entre ses rochers, et dessiné sur les rives des ruisseaux des arbres clairsemés, comme pour signifier l’attente de la vie. Le contraste est saisissant entre cette tranquillité et les deux tiers supérieurs de la page, placés sous le signe de la puissance. Par la taille donnée au Créateur, et par le choix d’un double geste d’autorité qui lui fait occuper toute la largeur de la page, et cite Michel-Ange, Vincent Raymond a donné à voir la toute-puissance d’un Dieu assez anthropomorphe pour être doté d’une musculature impressionnante, dont les cheveux blancs signalent l’éternité. Il semble assis sur un manteau bleu et rose pâle qui l’entoure à la façon d’un trône. En contrepartie, la chevelure animée par le vent et le mouvement de gauche à droite des pieds et du bas du manteau confèrent son dynamisme à cette force qui apparaît ainsi comme contenue et prête à se déployer.
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