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10 JESUS DANS L ART ET LA LITTERATURE Jesus, mais qui donc est cet homme ? PIERRE-MARIE VARENNES «Il n’est en art qu’une chose qui vaille : celle qu’on ne peut expliquer.» Georges Braque PROLOGUE 11 Dans notre culture, depuis près de vingt siècles, le principal sujet et motif choisi par les artistes et les écrivains a sans conteste été un prophète juif nommé Jésus de Nazareth en référence à son origine géographique. Fondateur du christianisme, il est plus volontiers appelé Jésus-Christ par les croyants pour signifier la mission divine de Sauveur du monde dont il se proclamait investi. La « vie » et le message de ce Jésus nous ont été transmis principalement par quatre récits distincts rassemblés sous le nom d’Évangiles. Les grands génies dont ce livre vous propose d’admirer les chefs-d’œuvre avaient une connaissance profonde, intime même, des Évangiles. De surcroît, la plupart pratiquaient fidèlement la religion chrétienne et entretenaient avec ce personnage historique une relation de vénération et d’amour. En notre époque postmoderne, la connaissance de Jésus et de sonmessage est généralement devenue superficielle, voire insignifiante. Il semble donc essentiel de revisiter rapidement son «histoire », sa geste et l’essentiel de son enseignement avant d’accéder aux mystères que donnent à contempler les œuvres d’art reproduites dans cet ouvrage. Jésus naît vers l’an 6 avant notre ère1 au cœur de l’Orient gréco-romain, précisément dans le royaume de Judée, sous le règne d’Hérode Ier, dit le Grand. À cette époque, Hérode arrive au terme d’un règne brillant qui avait commencé une trentaine d’années plus tôt. Il souffre d’un mal incurable qui va bientôt l’emporter. La question de sa succession l’obsède et il s’emploie à déjouer intrigues et complots, réels ou imaginés, ourdis par ses proches. Son œuvre a marqué son temps : n’a-t-il pas été jusqu’à restaurer les Jeux olympiques tombés en désuétude, pour en être nommé président à vie ? En monarque dur et avisé, et souvent au prix du sacrifice des sujets de son royaume, il a contribué demanière décisive à faire passer la terre nationale des Juifs à la modernité gréco-romaine. La langue et l’administration sont devenues grecques, et nombre de villes reconstruites ou nouvelles rivalisent de splendeur avec les cités helléniques : voies de communication pavées, portiques et aqueducs, théâtres et palais, hippodromes et cirques, et jusqu’aux amphithéâtres témoignent d’un passage accéléré à la civilisation païenne. L’Empire romain, dont Auguste est alors le souverain, apprécie l’indéfectible « amitié » d’Hérode le Grand. La mémoire des Juifs conserve surtout de lui l’image du reconstructeur du Temple grandiose qui, à Jérusalem, leur capitale ancestrale, remplissait alors les fonctions de sanctuaire royal. Selon les récits évangéliques, c’est dans ce contexte que Marie, femme de Joseph, met au monde son fils premier-né à Bethléem, en Judée, à quelques kilomètres au sud de Jérusalem. Suivant la tradition juive, huit jours plus tard, à l’occasion de sa circoncision, ses parents donnent au nouveau-né le nom de Jésus, Yéshûâ en araméen (la langue sémitique locale), qui signifie «Dieu sauve ». Après un court exil imposé par les persécutions d’Hérode, et que l’Évangile situe en Égypte, Joseph et Marie s’en reviennent vivre au nord de la Palestine, àNazareth de Galilée, ville dont ils sont originaires. Le modeste bourg est situé à six kilomètres de la puissante et somptueuse Sepphoris qu’Hérode Antipas, succédant à son père mort en 4 avant notre ère, avait décidé de reconstruire pour en faire sa première capitale. Ainsi Jésus enfant sera-t-il témoin direct de la façon dont cet Hérode de la deuxième génération poursuit la politique paternelle d’ouverture à la culture gréco-romaine. On ne sait pas grand-chose des faits et gestes de Jésus enfant. Il suit les progrès de l’âge comme tous les autres enfants. Sur une terre imprégnée de culture grecque dite « hellénistique », il est élevé selon les traditions du milieu juif populaire auquel il appartient et qui le nourrit de la sève ancestrale. Sans doute le jeune Jésus se joint-il aux assemblées régulières qui se tiennent dans le cadre familial et dans les synagogues, où l’on prie, chante les psaumes, lit et 1 Notre ère, autrement dit « après Jésus-Christ », commence à la date présumée de la naissance de Jésus, telle qu’elle a été fixée, à quelques années près, par un moine savant au VIe siècle. Aujourd’hui, les historiens établissent la naissance de Jésus entre l’an 9 et l’an 3 avant notre ère.

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