Compagnon Carême 2023

– 1 – Éditorial David Gabillet Rédacteur en chef Retour vers le baptême Un pèlerinage de 40 jours : tel est le chemin qui se présente à nous. À son terme, nous célébrerons Pâques avec celles et ceux, anciens et nouveaux baptisés, nés à la vie nouvelle après avoir traversé l’épreuve de la mort dans le Christ. Auparavant s’ouvre une aventure spirituelle inconnue, faite de pénitence et de réconciliation certainement, mais aussi d’initiation au mystère du Christ qui est en même temps mystère de notre vie greffée à lui par l’action de l’Esprit. C’est cette initiation reçue par les catéchumènes pendant le Carême que ce compagnon souhaiterait vous proposer, car la réactivation de la mémoire de notre naissance à la vie intime avec le Seigneur, ce mystère de notre relation au Christ, est l’appui offert pour une impulsion vers la sainteté. Au fil de ce Carême, nous serons invités à méditer, à recevoir les richesses et les soutiens que la liturgie nous donne pour vivre unis au Christ en laissant infuser en nous la divine miséricorde afin de nous revêtir de l’homme nouveau. Ainsi préparés, nous célébrerons à Pâques la victoire du Dieu vivant, gage de la victoire finale promise qui nous attend au terme de nos combats spirituels, lorsque toute trace de mal et de péché aura disparu, que tout seramis sous le pouvoir du Fils et qu’ainsi Dieu sera tout en tous (1 Co 15, 28). ■

– 2 – – 3 – Dans les premiers siècles de l’Église, le Carême était avant tout le temps de l’ultime préparation des catéchumènes au baptême. On peut même dire que ce temps liturgique est né de cet accompagnement des catéchumènes par toute la communauté. Les baptisés reprennent donc le chemin de l’initiation baptismale. La notion d’« Initiation chrétienne » doit en effet être bien comprise : il ne s’agit pas seulement d’un apprentissage comme on parle d’initiation à l’informatique. Il s’agit d’un chemin de foi qui est appelé sans cesse à se renouveler. Le Carême est, à ce titre, un mémorial annuel du processus qui a fait de nous des disciples du Christ. Il ne s’agit pas de viser des performances ascétiques. Benoît précise « chacun offrira de sa propre volonté à Dieu, dans la joie du Saint-Esprit, quelque chose au-dessus de la mesure qui lui est prescrite » (RB, n° 49). Le carême est donc paradoxalement un temps où l’on cultive la joie de l’Évangile comme le pape François y invite dans l’exhortation La Joie de l’Évangile : Il y a des chrétiens qui semblent avoir un air de Carême sans Pâques. Cependant, je reconnais que la joie ne se vit pas de la même façon à toutes les étapes et dans toutes les circonstances de la vie, parfois très dure. Elle s’adapte et se transforme, et elle demeure toujours au moins comme un rayon de lumière qui naît de la certitude personnelle d’être infiniment aimé, au-delà de tout (EG). En définitive, le Carême est une grande marche : comme tout itinéraire, et ce compagnon de Carême est destiné à accompagner le chemin, il y a un point de départ – il faut se mettre en route – mais aussi un point d’arrivée : et c’est la « Grande Semaine », la Semaine sainte, et spécialement la nuit pascale. C’est encore ce que dit saint Benoît qui nous invite à vivre le Carême en attendant « la sainte Pâque avec la joie du désir spirituel ». En marche vers Pâques Frère Patrick Prétot À la manière d’un départ en voyage, la célébration des Cendres est la grande entrée dans le Carême. La dimension pénitentielle de ce jour du Carême a son origine profonde dans la discipline de l’Église ancienne. Les cendres Ceux qui avaient commis des fautes très graves entraient dans une période de pénitence – on les appelait les « pénitents » –, pour se préparer à la célébration de la réconciliation qui était présidée par l’évêque le Jeudi saint. Ainsi, le Carême était alors comme polarisé par la fête de Pâques dont personne ne devait être exclu. L’entrée en pénitence impliquait des signes extérieurs (vêtement) mais aussi la cendre sur la tête. Recevoir les cendres est donc un signe de notre solidarité dans le désir de « revenir à Dieu de tout notre cœur ». La réforme liturgique issue de Vatican II a voulu retrouver cette dimension dans le sacrement de pénitence : même célébré dans sa forme dite privée, le sacrement la « réconciliation » est une célébration de l’Église. Il s’agit d’une actualisation du baptême qui nous réintroduit dans la communion avec Dieu et avec nos frères et sœurs. Un chemin de foi Mais le Carême n’est pas seulement un temps de pénitence et d’efforts de conversion. C’est comme le dit la Règle de saint Benoît (RB), un temps d’attente de la Pâque. Le père des moines d’Occident invite en effet à ajouter quelque chose « à la tâche ordinaire de notre service » (RB, n° 49) : il vise ainsi à faire du Carême un temps « extra-ordinaire » au sens premier, c’est-à-dire qui sort de l’ordinaire.

– 5 – – 4 – Mercredi des Cendres MERCREDI 18 FÉVRIER Parole de Dieu Jl 2, 12-13 Maintenant – oracle du Seigneur – revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les larmes et le deuil ! Déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements, et revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment. Pour ouvrir notre Carême, temps de conversion, le prophète Joël nous ramène tout simplement au Sinaï, à l’expérience fondatrice d’Israël. C’est là que Dieu a révélé son Nom à Moïse en même temps qu’il lui annonçait son projet de libération : ce nom « SEignEUR » (YHVH en hébreu) reste désormais gravé à tout jamais dans la mémoire d’Israël. Ce nom qui dit la sollicitude, la tendre présence du Tout-Puissant auprès de ses enfants ; c’est ce même Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour qui nous appelle à revenir vers lui : « Revenez à moi », nous dit-il. Non pas en accumulant des pratiques, si méritoires soient-elles. Plus profondément, il suffit d’ouvrir nos cœurs, de nous décider une fois pour toutes à croire qu’il est le Père qui vient avec tendresse à la rencontre de ses enfants, comme le dit le concile Vatican II. Car la vérité de la conversion se joue dans l’intimité du cœur et non dans des manifestations extérieures. Marie-Noëlle Thabut paRtageR L’effort de conversion demandé pendant le temps de Carême rappelle aux baptisés qu’ils ont à tendre vers le royaume des Cieux. Cette transformation est un travail intérieur de conformation à Dieu qui est l’œuvre de l’Esprit. Par l’imposition des Cendres : « Souviens-toi que tu es poussière, et que tu retourneras en poussière », nous reconnaissons notre humilité et notre fragilité devant la miséricorde infinie de Dieu , et notre volonté de revenir vers lui de tout notre cœur. pRieR Seigneur mon Dieu, donne à mon cœur de te désirer ; en te désirant, de te chercher ; en te cherchant, de te trouver ; en te trouvant, de t’aimer ; et en t’aimant, de racheter mes fautes ; et une fois rachetées, de ne plus les commettre. Saint Anselme de Cantorbéry JeÛneR Cette année encore le temps de Carême nous invite à faire un retour sur nous-mêmes, « revenez à moi de tout votre cœur », dans la lumière de la miséricorde de Dieu. Nous sommes pécheurs parce que notre cœur s’est détourné de Dieu. Laissons grandir en nous l’homme intérieur, cette exigence nous contraint à faire taire les murmures qui nous habitent, à renoncer à de nombreuses dissipations pour revenir peu à peu à la source. Partage ton pain avec l ’affamé, voilà le jeûne qui plaît à Dieu. i 22 M C

– 7 – – 6 – J C Jeudi après les Cendres JEUDI 23 FÉVRIER Psaume 1, 1-2 Heureux est l’homme qui n’entre pas au conseil des méchants, qui ne suit pas le chemin des pécheurs, ne siège pas avec ceux qui ricanent, mais se plaît dans la loi du Seigneur et murmure sa loi jour et nuit ! La Loi, chemin de bonheur ! C’est ce qu’affirme le psaume 1 qui ouvre le Carême. N’est-ce pas trop dire ? Et pourtant, le tout premier mot du psautier est le mot « Heureux » qui résonne à la fois comme une promesse et une invitation. La promesse, c’est ce projet de bonheur que Dieu forme pour l’humanité depuis l’aube du monde : un bonheur tel qu’il ressemble à l’entrée dans une salle des fêtes préparée pour des noces. L’invitation, c’est l’appel à se laisser modeler patiemment, quotidiennement, par la Loi donnée par Dieu comme une recette du bonheur et de la paix. Si l’on y réfléchit, chacun des commandements ressemble à un article du Code de la Route ; il vise un seul objectif : qu’en toutes circonstances notre voyage soit paisible. Pour y parvenir, une seule chose est nécessaire : faire confiance à notre Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour (Jl 2, 13). Celui qui nous a créés à son image sait que nous sommes faits pour aimer. M.-N. T. paRtageR Est heureux celui qui marche, pèlerin, vers le cœur de Dieu. Cette béatitude est un don de Dieu qui se cultive. « À des amants, il faut la solitude, un cœur à cœur qui dure nuit et jour », témoignait Thérèse de l’Enfant-Jésus. Aujourd’hui est le temps de la décision : la procrastination n’est pas biblique, choisir de cheminer heureux l’est davantage. « Je souhaite à chacun et chacune de vous de découvrir ce regard du Christ et d’en faire l’expérience jusqu’au bout » (saint Jean-Paul II). pRieR Père, ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi, et qu’ils contemplent ma gloire, celle que tu m’as donnée parce que tu m’as aimé avant la fondation du monde. Jean 17, 24 JeÛneR La prière est ce mouvement d’amour dans lequel Dieu me fait entrer. Le bruit de la vie nous en éloigne. Voilà un autre jeûne possible : Quel est mon rythme actuel de prière silencieuse ? Suis-je un « ballotté » par les événements de la vie ou un « enraciné quotidien » dans l’amour divin ? Poussé par l’Esprit Saint, vais-je accepter d’écouter cet appel : Je vais la séduire, je vais l’entraîner jusqu’au désert, et je lui parlerai cœur à cœur (Os 2, 16). Dieu d’Abraham, souviens-toi de ta promesse !

– 9 – – 8 – Vendredi après les Cendres VENDREDI 24 FÉVRIER Parole de Dieu Mt 9, 14-15 Les disciples de Jean leBaptiste s’approchent de Jésus en disant : « Pourquoi, alors que nous et les pharisiens, nous jeûnons, tes disciples ne jeûnent-ils pas? » Jésus leur répondit : « Les invités de la noce pourraient-ils donc être en deuil pendant le temps où l’Époux est avec eux? Mais des jours viendront où l’Époux leur sera enlevé ; alors ils jeûneront. » Ce jour-là, Jésus a fait une belle confidence aux disciples de Jean Baptiste : il a quitté sa réserve habituelle pour annoncer clairement qu’il était l’Époux et que l’heure des noces de Dieu avec l’humanité avait sonné. Ses auditeurs ont certainement compris où il voulait en venir, mais ils ont été, pour certains au moins, scandalisés. Car, depuis des siècles, les synagogues résonnaient des paroles des prophètes qui parlaient en termes de noces pour décrire l’Alliance jadis conclue par Dieu avec son peuple mené par Moïse sur le chemin de l’Exode. C’est le prophète Osée qui, le premier, au viiie siècle av. J.C., avait pressenti que cette alliance allait bien au-delà du pacte juridique que l’on avait d’abord imaginé : il parlait des fiançailles de Dieu avec son peuple ! Les prophètes ultérieurs ont été encore plus loin : un jour viendra où l’humanité tout entière répondra à l’invitation et entrera dans la salle des noces éternelles. M.-N.T. paRtageR Au commencement de ce Carême, nous entrons, comme la liturgie nous le rappelle, dans un temps de pénitence « afin que la discipline imposée à notre corps soit aussi pratiquée d’un cœur sincère ». La grande souffrance de celui qui aime est d’être séparé de son bien-aimé. Tous nos manques d’amour nous séparent de Dieu, c’est pourquoi la tradition biblique balise notre chemin par trois pratiques pénitentielles : la prière, l’aumône et le jeûne. Ne craignons pas de nous saisir de ces moyens qui orientent notre vie vers l’Époux ! pRieR Pour rechercher mon Bien-Aimé, J’irai par ces monts et ces rivages, Je ne cueillerai pas de fleurs, Je ne redouterai point les bêtes féroces, Et je passerai les forts et les frontières. Saint Jean de la Croix JeÛneR Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim (Mt 4, 2). Que signifie pour moi « suivre Jésus au désert et jeûner avec lui » ? Le croyant va au désert pour reprendre contact avec Dieu, parce qu’il sait que c’est « dans l’homme intérieur qu’habite la Vérité ». Le père Cantalamessa dans une conférence de Carême invitait à découvrir « combien le bonheur et la paix que nous recherchons dans ce monde sont si proche de nous ». Jésus nous attend au désert : ne le laissons pas seul pendant tout ce temps ! Jeûnons de paroles inutiles, de dispersions superficielles. Qui est vainqueur du monde, sinon celui qui croit ? V C

– 11 – – 10 – Samedi après les Cendres SAMEDI 25 FÉVRIER Parole de Dieu Is 58, 9b-10 Ainsi parle le Seigneur : Si tu fais disparaître de chez toi le joug, le geste accusateur, la parole malfaisante, si tu donnes à celui qui a faim ce que toi, tu désires, et si tu combles les désirs du malheureux, ta lumière se lèvera dans les ténèbres et ton obscurité sera lumière de midi. C’est un avenir de lumière qui nous est promis ! Et si nous acceptons de jouer humblement le jeu du Carême, jour après jour, il nous sera donné d’apporter un peu de cette lumière promise dans notre humanité. Nous sommes habitués à envisager le Carême en termes de privation. Et voilà que le prophète nous suggère une privation d’un genre nouveau. Il s’agit de nous interdire certains gestes, certaines attitudes, certaines paroles : ce qui enferme, ce qui emprisonne, les étiquettes que nous collons si facilement sur le front de ceux qui ne partagent pas notre avis ou notre culture. Le joug, ce sont ces fardeaux trop lourds que nous imposons aux autres, ces objectifs trop ambitieux que nous leur fixons. Au fond, il s’agit seulement de retenue : retenir le bon mot trop facile, qui blesse ; retenir nos gestes pour mieux ouvrir nos yeux aux besoins et aux désirs des autres ; s’interdire de juger et de montrer du doigt, retenir nos paroles pour mieux écouter. M.-N.T. paRtageR Le Carême nous pousse à suivre les paroles du prophète Isaïe. À l’école du Christ, nous apprenons à faire de notre vie un don total ; en choisissant Jésus comme modèle, nous nous disposons non pas tant à donner quelque chose qu’à nous donner nous-mêmes. Plus nous reconnaîtrons notre fragilité, plus nous percevrons que la proximité de Dieu nous est indispensable : Lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort (2 Co 12, 10). pRieR Jésus en nous ne cesse pas d’être envoyé, au long de ce jour qui commence, à toute l’humanité, de notre temps, de tous les temps, de ma ville et du monde entier. À travers les proches frères qu’il nous fera servir, aimer, sauver, des vagues de sa charité partiront jusqu’au bout du monde, iront jusqu’à la fin des temps. Béni soit ce nouveau jour, qui est Noël pour la terre, puisqu’en moi Jésus veut le vivre encore. Madeleine Delbrël JeÛneR Le pape François nous appelle à vivre le jeûne comme l’expérience du manque. En éprouvant une pauvreté consentie, j’apprendrai àdevenir « pauvreavec lespauvres » et à « amasser » la richesse de l’amour reçu et partagé. À l’écoute du prophète Isaïe, je peux décider de me désencombrer de mes a priori, de mes jugements hâtifs, etc. M’appliquerai-je à maîtriser ma langue et à modifier mon regard ? Prenons le risque aujourd’hui de ne dire que des paroles valorisantes à ceux que nous rencontrerons. Toi qui viens nous sauver, révèle-nous ton nom! S C

– 12 – – 13 – Les Évangiles de Carême Frère Patrick Prétot Les dimanches de Carême constituent un chemin que chaque annéenous empruntons ànouveaupour ydécouvrir le mystère de la relation au Christ que le baptême instaure. Entendre ces Évangiles dans la liturgie, lesméditer engroupe ou personnellement, peut donc être compris comme une sorte de session annuelle de formation permanente pour les baptisés, et pas seulement comme l’accompagnement liturgique de la dernière étape de préparation au baptême pour les catéchumènes. Un itinéraire de formation Chaque année en effet, lors des deux premiers dimanches, reviennent les deux mêmes récits, celui de la tentation de Jésus au désert (1er dimanche) et celui de la Transfiguration (2e dimanche). Au fil des trois années (A, B et C), la liturgie nous fait ainsi entendre les trois versions de ces récits rapportées par les Évangiles synoptiques (Matthieu, Marc et Luc). Il convient d’être attentif au fait que chaque Évangile relate ces deux épisodes avec ses accents propres. Ainsi la version du récit de la tentation, extrêmement brève chez Marc (Mc 1, 12-15) est nettement différente de celle que l’on trouve chez Matthieu (Mt 4, 1-11) et chez Luc (Lc 4, 1-13). Ce porche d’entrée est évidemment de grande portée pour la vie spirituelle. À travers ces deux moments, il apparaît que si la vie chrétienne implique l’entrée dans le combat spirituel, ce que le rituel baptismal manifeste à travers le double mouvement de renonciation au mal et d’adhésion au Christ, le récit de la Transfiguration indique le terme du chemin, entendre avec Jésus la voix du Père « Celui-ci est mon Fils bien-aimé » (Mt 17, 5). Combat et promesse sont les deux faces de ce chemin du Carême. Pour tous les chrétiens Ensuite durant l’année A (c’est le cas pour ce Carême 2023) – et tous les ans s’il y a des catéchumènes –, ce sont trois récits tirés de l’Évangile de Jean qui rythment la célébration des scrutins. Ces passages mettent en lumière différentes facettes de la relation au Christ du baptisé. Car être chrétien, c’est, en définitive, se laisser interroger par la parole du Christ et y répondre par sa vie : « Et pour vous, qui suis-je? » (Mt 16, 15). Le 3e dimanche, à l’école de la Samaritaine (Jn 4, 5-42), il s’agit en effet de découvrir le Christ, celui qui « nous fera connaître toutes choses » (cf. v. 25) et qui se donne à reconnaître : « Je le suis, moi qui te parle » (v. 26). Avec l’aveugle-né que Jésus guérit (Jn 9, 1-41), il s’agit, le 4e dimanche, de « voir » vraiment et pour cela, de se laisser guérir par celui qui se manifeste comme le « Fils de l’homme » (v. 35). La confession de foi de l’aveugle guéri : « Je crois, Seigneur ! » (v. 38), est celle de tout croyant se mettant à l’écoute de celui « qui te parle » (v. 37). On ne peut voir sans croire. Enfin le 5e dimanche, la résurrection de Lazare (Jn 11, 1-45) annonce une promesse faite à tous ceux qui croient au Christ ; c’est le cri de joie de la nuit pascale : « Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ; quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais » (v. 25-26). La foi est promesse de vie éternelle. La route vers Pâques va ainsi d’un regard sur la condition humaine aux prises avec les tentations du pouvoir, de l’avoir et de la gloire (1er dimanche), jusqu’à la découverte de la vie véritable, celle que Jésus offre à ceux qui mettent leur foi en lui (5e dimanche). La foi est source de vie, promesse, mais : « Crois-tu cela? » (Jn 11, 26).

– 15 – – 14 – Parole de Dieu Rm 5, 18-19 Bref, de même que la faute commise par un seul a conduit tous les hommes à la condamnation, de même l’accomplissement de la justice par un seul a conduit tous les hommes à la justification qui donne la vie. En effet, de même que par la désobéissance d’un seul être humain la multitude a été rendue pécheresse, de même par l’obéissance d’un seul la multitude serat-elle rendue juste. Sous ces lignes se cachent deux figures que nous reconnaissons bien : Adam et Jésus. Paul nous les présente comme deux figures qui vivent deux histoires : l’un, celle de la chute, l’autre, celle du salut. Nous pourrions ainsi opposer trop facilement Adam et Jésus : l’un vivant la désobéissance et l’autre, la fidélité ; l’un, le péché, l’autre, la justice… Mais le temps du Carême nous rappelle à temps et à contretemps que ce qui unit Adam, Jésus et chacun d’entre nous, c’est que nous partageons la même humanité et la même histoire. C’est précisément dans cette solidarité que Paul nous appelle à découvrir l’œuvre de Dieu. Nous sommes ainsi dans ce temps favorable à l’accueil du salut, car nous pouvons, dans la force de l’Esprit, parcourir sans cesse le chemin d’Adam au Christ et éprouver, dans cette union, qu’Adam est appelé à la vie du Christ ; que le salut nous est donné pour vivre une vie belle, bonne, joyeuse et vertueuse à la stature du Christ. Père Sylvain Brison pRiÈRe Pour nous aider à prier, nous pouvons placer devant nous une croix ou une image du Christ en croix. Les yeux fixés sur Jésus Christ, entrons dans le combat de Dieu. Gloire au Père, et au Fils, et au Saint-Esprit, au Dieu qui est, qui était, et qui vient, pour les siècles des siècles. Amen. chanteR L’heure est venue de l’exode nouveau ! Voici le temps de renaître d’en haut ! Quarante jours avant la Pâque, Vous commencez l’ultime étape. Vivons en enfants de lumière sur les chemins où l’Esprit nous conduit : que vive en nous le nom du Père ! L’heure est venue de sortir du sommeil ! Voici le temps de l’appel au désert ! Allez où va le Fils de l’homme, La joie de Dieu sur lui repose. L’heure est venue de lutter dans la nuit, Voici le temps d’affronter l’Ennemi ! N’ayez pas peur face aux ténèbres, À l’horizon la croix se dresse. CFC © Studio SM pRieR avec le psaUme 50 Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour, selon ta grande miséricorde, efface mon péché. 1er dimanche de Carême DIMANCHE 26 FÉVRIER

– 17 – – 16 – Lave-moi tout entier de ma faute, purifie-moi de mon offense. Oui, je connais mon péché, ma faute est toujours devant moi. Contre toi, et toi seul, j’ai péché, ce qui est mal à tes yeux, je l’ai fait. Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu, renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. Ne me chasse pas loin de ta face, ne me reprends pas ton esprit saint. Rends-moi la joie d’être sauvé ; que l’esprit généreux me soutienne. Seigneur, ouvre mes lèvres, et ma bouche annoncera ta louange. Ps 50 , 3-6ab.12-14.17 Rendre grâce En ce premier dimanche du Carême, nous voulons te rendre grâce, Seigneur, pour ton amour, et particulièrement pour notre baptême, tu nous as choisis pour que nous soyons « saints et irréprochables » (cf. Ep 1, 4), nous sommes appelés fils et filles de Dieu, que notre vie en témoigne ! (Intentions personnelles) Unis en Jésus Christ, nous disons : Notre Père… Prions : Dieu tout-puissant, toi qui nous invites chaque année à vivre le Carême en vérité, donne-nous de progresser dans l’intelligence du mystère du Christ et d’en chercher la réalisation par une vie qui lui corresponde. Un pape commente l’Évangile (Mt 4, 1-11) Face à cette figure obscure et ténébreuse qui ose tenter le Seigneur, apparaissent, à peine entrevus dans la brièveté du récit, les anges, figures lumineuses et mystérieuses. Les anges, dit l’Évangile, servaient Jésus (v. 11) ; ils sont le contrepoint de Satan. Ange veut dire « envoyé ». Nous trouvons ces figures, qui aident et guident les hommes au nom de Dieu, dans tout l’Ancien Testament. Il suffit de se souvenir du livre de Tobie, dans lequel apparaît la figure de l’ange Raphaël, qui assiste le protagoniste dans tant de vicissitudes. La présence rassurante de l’ange du Seigneur accompagne le peuple d’Israël dans tous les événements bons et mauvais. Au seuil du Nouveau Testament, Gabriel est envoyé pour annoncer à Zacharie et à Marie les heureux événements qui sont le début de notre salut ; et un ange, dont on ne dit pas le nom, avertit Joseph, l’orientant dans ce moment d’incertitude. Un chœur d’anges annonce aux pasteurs la bonne nouvelle de la naissance du Sauveur ; ce sont aussi des anges qui annonceront aux femmes la joyeuse nouvelle de la résurrection. À la fin des temps, les anges accompagneront la venue de Jésus dans la gloire (cf. Mt 25, 31). Les anges servent Jésus, qui est assurément supérieur à eux, et sa dignité est ici, dans l’Évangile, proclamée de manière claire, bien que discrète. En effet, même dans une situation d’extrême pauvreté et d’humilité, quand Il est tenté par Satan, Il reste le Fils de Dieu, le Messie, le Seigneur. Chers frères et sœurs, invoquons-les souvent, pour qu’ils nous soutiennent dans l’engagement de suivre Jésus, jusqu’à nous identifier à Lui. Benoît XVI CARÊME 2023

– 117 – – 116 – CHEMIN DE CROIX En ce jour, l’Église s’attache à suivre et à accompagner le Christ sur le chemin de la croix. On peut le faire à partir des stations dites « traditionnelles », on peut aussi s’attacher au textedesÉvangiles.C’est le cheminquenous vous proposons de prendre. Ta croix, Seigneur, nous la vénérons, et ta sainte résurrection, nous la chantons : c’est par le bois de la croix que la joie est venue dans le monde. I ���������������������������������L’arrestation de Jésus À peine arrivé, Judas, s’approchant de Jésus, lui dit : « Rabbi ! » Et il l’embrassa. Les autres mirent la main sur lui et l’arrêtèrent. (Mc 14, 45-46) Jésus que l’on a bafoué sans raison, prends pitié de ceux dont l’amour est trahi. II ������������������������ Jésus est condamné à mort Pilate dit aux Juifs : « Voici votre roi. » Les grands prêtres répondirent : « Nous n’avons pas d’autre roi que l’empereur. » Alors, il leur livra Jésus pour qu’il soit crucifié. (Jn 19, 14b.15c-16a) Jésus que l’amour du Royaume a perdu, prends pitié de ceux que l’on condamne injustement. III �������������������� Jésus est couronné d’épines Les soldats rassemblent toute la garde, ils revêtent Jésus de pourpre, et lui posent sur la tête une couronne d’épines qu’ils ont tressée. (Mc 15, 16b-17) Jésus soumis à la violence gratuite, prends pitié de ceux que l’on torture. IV �������������������� Jésus est chargé de la croix Jésus, portant sa croix, sortit en direction du lieu dit Le Crâne (ou Calvaire), qui se dit en hébreu Golgotha. (Jn 19, 17) Jésus humilié par les hommes, prends pitié de ceux qui peinent pour la justice. V ��� Simon de Cyrène porte la croix de Jésus Comme ils l’emmenaient, ils prirent un certain Simon de Cyrène, qui revenait des champs, et ils le chargèrent de la croix pour qu’il la porte derrière Jésus. (Lc 23, 26) Jésus qui peines sur le chemin de la croix, prends pitié de ceux qui peinent à poursuivre leur existence. VI �� La compassion des femmes de Jérusalem Des femmes se frappaient la poitrine et se lamentaient sur Jésus. Il se retourna et leur dit : « Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! Pleurez plutôt sur vous-mêmes et sur vos enfants ! » (Lc 23, 27b-28) Jésus consolé par les femmes, prends pitié de ceux qui sont indifférents au malheur des autres.

– 119 – – 118 – VII ������������������������������������������ Jésus en croix Après l’avoir crucifié, les soldats restaient là, assis, à le garder. Au-dessus de sa tête ils placèrent une inscription indiquant le motif de sa condamnation : « Celui-ci est Jésus, le roi des Juifs. » (Mt 27, 35a.36-37) Jésus mis en croix, prends pitié de ceux dont on restreint la liberté. VIII ������������������������� La tunique sans couture Quand les soldats eurent crucifié Jésus, ils prirent ses habits ; ils en firent quatre parts, une pour chaque soldat. Ils prirent aussi la tunique ; c’était une tunique sans couture, tissée tout d’une pièce de haut en bas. Alors ils se dirent entre eux : « Ne la déchirons pas, désignons par le sort celui qui l’aura. » (Jn 19, 23-24a) Jésus mis à nu devant les hommes, prends pitié de ceux qui sont dégradés et avilis par leurs semblables. IX ��������� Jésus en croix est raillé et outragé Les chefs tournaient Jésus en dérision et disaient : « Il en a sauvé d’autres : qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu! » Les soldats aussi se moquaient de lui. (Lc 23, 35b-36a) Jésus qui n’as pas trouvé de consolateur, prends pitié de ceux qui souffrent la dérision. X ����������������������� Marie, la mère douloureuse Jésus, voyant sa mère, et près d’elle le disciple qu’il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. » Puis il dit au disciple : « Voici ta mère. » (Jn 19, 26-27a) Jésus crucifié devant ta mère, prends pitié des femmes dont on tue les enfants. XI ������������������� Jésus est abreuvé de vinaigre On fixa donc une éponge remplie de ce vinaigre à une branche d’hysope, et on l’approcha de sa bouche. (Jn 19, 29b) Jésus abreuvé de vinaigre, prends pitié de ceux dont la confiance est trompée. XII ������������������������������������� La mort de Jésus Jésus, poussant un grand cri, expira. (Mc 15, 37) Jésus mort pour nos péchés, prends pitié des hommes de ce monde et donne-leur le salut. XIII ��������������������������������������� Le côté ouvert Quand les soldats arrivèrent à Jésus, voyant qu’il était déjà mort, ils ne lui brisèrent pas les jambes, mais un des soldats avec sa lance lui perça le côté. (Jn 19, 33-34a) Jésus transpercé par la lance, prends pitié des hommes qui ont abdiqué toute compassion. XIV ��������������������� L’ensevelissement de Jésus Joseph d’Arimathie descendit Jésus de la croix, l’enveloppa dans un linceul et le mit dans un tombeau taillé dans le roc, où personne encore n’avait été déposé. (Lc 23, 53) Jésus mis au tombeau dans le soir, prends pitié de ceux qui espèrent contre toute espérance. Notre Père…

– 132 – COMPAGNON DE CARÊME 2023 Directeur de la rédaction : Pierre-Marie Varennes Directeur adjoint de la rédaction : Romain Lizé Rédacteur en chef : David Gabillet Rédactrice en chef adjointe : Marie-Laure Martin Saint-Léon 1re rédactrice graphiste & secrétaire de rédaction : Solange Bosdevesy 1re secrétaire de rédaction & iconographe : Isabelle Mascaras Rédactrices-réviseuses : Catherine Mas-Mézéran, sœur Anne-Cécile Rupied Conception & mise en page : Solange Bosdevesy Ont collaboré à ce numéro : Mgr Jean-Claude Boulanger, Marie-Noëlle Thabut, P. Sylvain Brison, S. Jean Thomas, P. Luc de Bellescize, Christelle Javary, F. Patrick Prétot, P. Paul-Antoine Drouin. Magnificat est publié par Magnificat SAS au capital de 789230 �. Président, directeur de la publication: Vincent Montagne. Principal actionnaire: Média-Participations Paris au capital de 50 494 416 �. N°CPPAP: 0924 K 85377. N°ISSN: 1240-0971. Dépôt légal : janvier 2023. © AELF Paris, 2015, pour les textes liturgiques. © Magnificat SAS, 2023, pour l’ensemble de l’ouvrage. Tous droits réservés pour tous pays. Achevé d’imprimer en décembre 2022 par L.E.G.O. SpA, Italie. N° d’édition: MGN23005. « Imprimé sur du papier PEFCTM ». « Cet ouvrage est imprimé grâce à des encres à base d’huile végétale, garantissant la démarche de développement durable de l’éditeur et de l’imprimeur. » ISBN : 3760283222090 – Code MDS : MT22090 Rédaction : courrier@magnificat.fr 57, rue Gaston Tessier CS 50061 – 75166 Paris Cedex 19 Promotion : magnificat-promo@magnificat.fr POUR CONTACTER LE SERVICE COMMERCIAL : (Abonnement, réabonnement, numéro non reçu, etc.) sotiaf/magnificat – TSA 29021 – 35909 Rennes Cedex 9 TÉL. : 02.99.55.10.20 – EMAIL : contact@magnificat.fr www.magnificat.fr TARIFS : 1 AN : France : Format poche : 44 € et grand format : 49 €. UE /DOM : Format poche : 47 € et grand format : 54 €. TOM/Autres pays : Format poche : 64 € et grand format : 69 €. 2 ANS : France : Format poche : 79 € et grand format : 89 €. UE /DOM : Format poche : 86 € et grand format : 99 €. TOM/Autres pays : Format poche : 114 € et grand format : 124 €. Vous pouvez exercer votre droit d’accès aux données vous concernant et les faire rectifier en vous adressant à : Magnificat, « Département Données personnelles » - 57, rue Gaston Tessier, 75019 Paris. Vos coordonnées peuvent être transmises à des sociétés partenaires de MAGNIFICAT SAS, excepté si vous cochez cette case ❏

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